De toute évidence, la ville d’Aïn Témouchent a pris, en l’espace d’une décennie, une dimension territoriale exceptionnelle. Partout, aux quatre coins de la cité, ont poussé comme des champignons, logements, écoles, services publics, villas cossues mais, hélas, rarement des espaces verts. Parfois mal maîtrisée, cette évolution a charrié quel ques aberrations urbanistiques dont nous reparlions après, une fois que nous aurons rendu justice à tous ceux qui, au lendemain du séisme de 1999, ont permis à la cité de recouvrer une bonne partie de son lustre d’antan. Et l’illustration de ce bel effort, qui mieux que la nouvelle ville érigée en un temps record peut en être le témoin ? Quand un autre défi aussi époustouflant a été lancé pour faire du pôle sud-est de la ville, un centre d’excellence où trônera, tel un trophée chèrement acquis, la future université. Un rêve devenu réalité, selon l’expression d’un responsable de la wilaya. Quel nom portera ce symbole du savoir et de la connaissance ? Sûrement celui d’une égérie de la localité. Il faudra y penser. Il existe d’autres sites où le progrès a imprimé sa marque. Les lotissements ont eu droit à des routes goudronnées, à des placettes, à l’éclairage public, au gaz de ville, à des terrains «matéco». De même que les lieux cultes de la ville ont changé de «look», à l’instar des talus dominant le carrefour de la daïra, point névralgique qui assure la jonction entre le vieux et l’ancien Témouchent
. Les banquettes qui entourent le site, ressemblent, désormais, à une vaste fresque au décor chatoyant exprimant les symboles culturels et économiques du terroir: poterie, vignoble, mosquée de Sidi Saïd, source d’eau, animaux, cafetière et théière pour souligner le sens de l’hospitalité des autochtones… etc. Le travail d’un artiste ingénieux qui, espérons-le, résistera à l’usure du temps. A quelques encablures, dans le prolongement du boulevard Mohamed-Boudiaf, apparaît la bande de séparation des deux voies, également aménagée. On y a planté du gazon venu de Sidi Moussa. Autant dire qu’il va falloir beaucoup de soins afin de préserver cette espèce de couvert végétal réputé difficile à entretenir.
Côté cour, la cité offre encore de nombreux exemples à inclure dans les préoccupations citoyennes. Mais nous ouvrons une parenthèse pour dire notre amertume -le sens du beau n’appartenant qu’à ceux qui savent apprécier le silence de la nature- suite à l’implantation d’un vaste ensemble en plein milieu d’un quartier résidentiel dont les seuls espaces collectifs viennent d’être «bouffés» par un projet de la CNEP/IMMO situé derrière le parc d’attractions. Outre, le goulot d’étranglement longeant la bibliothèque Malek-Bennabi pour aboutir à ces logements en construction, il est patent que cet ensemble va bouleverser l’équilibre de la place. Imaginons un peu qu’au lieu du béton, les larges allées et îlots formant une grande zone tampon avaient accueilli des équipements socio-sportifs (marché, complexe de proximité, crèche, boulodrome, square… etc).
Cela aurait certainement insuffler à l’endroit un cachet plus convivial, plus humain. Une donnée de la sociologie urbaine qui met en évidence l’utilité de renforcer les liens communautaires, comme c’est le cas ici entre les habitants de deux lotissements voisins. Une fois peuplé, le «no man’s land» vendu à la CNEP n’échappera pas au sentiment d’étouffement qui caractérise l’aspect de certains sites gagnés par la promiscuité.
Dans ce regard croisé, un autre lieu a attiré notre attention. Il se trouve dans un état de délabrement avancé malgré une enseigne qui donne sur le boulevard du 1er-Novembre. Il s’agit de l’ancien siège du CR Témouchent. Jusqu’à la fin des années 80, le local-cafétéria, datant du temps de la colonisation, accueillait les fans du club de football avant que ne surgisse un litige entre les gérants et l’APC. Entre-temps le séisme de 1999 n’a pas épargné la bâtisse qui demeure fermée à ce jour. Devenu un refuge malfamé accessible par une porte arrière, le local nécessite de sérieux travaux de réhabilitation. Vu sa position géographique, il constituera une intéressante source de revenus pour la commune qui pourrait en faire un hôtel-restaurant par exemple ou un foyer pour tous les footballeurs de la cité. Et à propos de recettes communales, d’aucuns s’interrogent sur le devenir du parc d’attractions qui ne draine plus les enfants. Une baisse notable de l’activité qui serait liée à la vétusté du matériel d’une part et à un contentieux juridique entre le bailleur et l’APC. Le manège, faute d’un investissement conséquent, est condamné à la ruine.
L’amélioration du cadre urbain n’a de sens que si les changements apportés sont épargnés par le temps, suffisamment du moins, pour justifier les dépenses consacrées; quand bien même il y aurait des raisons de faire la fine bouche sur la qualité de certains travaux effectués. Comme par exemple cette placette au demeurant assez coquette mais réalisée en pente, juste en face du centre payeur de la CNAS au-dessus duquel débouche une petite ruelle abandonnée, sans trottoirs, ni bitume, rongée par les herbes folles et les détritus au grand dam des riverains qui n’ont eu de cesse d’alerter les services de l’APC. Triste paradoxe. L’avers et le revers de la médaille.
Source : Echo-Oran