Les PDAU et le POS ont-ils une valeur prospective ?

S’il y a une ville qui est souvent citée comme un modèle de développement urbain, c’est bien Aïn Témouchent. Cela grâce à un programme de reconstruction financé et piloté par la Banque mondiale qui a veillé au strict respect des normes urbanistiques. Par la suite, d’autres projets non moins importants, à l’image de la seconde ville nouvelle en cours de réalisation au niveau du POS sud-est et comprenant plus de 8.000 logements, sont venus conforter cette dynamique, laquelle est en train de changer profondément la physionomie de la cité. Mais, à voir comment sont menés les programmes, il semble difficile d’admettre l’existence d’une démarche attachée aux principes d’une urbanisation cohérente et résolument moderniste. Autrement dit, de nombreuses réalisations mais point de stratégie.
Quand la directrice du secteur, ou la DUC (la connotation aristocratique au féminin n’est pas de mise tout comme au genre masculin) sacrifie au rituel du bilan assorti de chiffres à plusieurs zéros, les journalistes conviés au briefing, pris qu’ils sont sous le feu des statistiques, perçoivent mal certains paradoxes inhérents à la politique urbanistique en cours et charriés par les PDAU et les POS conçus en tant qu’instruments de planification locale. Le Plan directeur d’aménagement et d’urbanisme (PDAU) est établi à une échelle communale ou intercommunale. Il définit essentiellement un zonage, un territoire, et fixe les orientations en matière d’urbanisme et d’aménagement. Les PDAU sont instruits par les services du ministère de l’Habitat et approuvés par le ministre. Le POS, lui, s’applique généralement à une échelle infra communale ou communale lorsqu’il s’agit de petites communes. Il peut concerner également des secteurs et des portions de ville à urbaniser, à requalifier ou à réhabiliter, comme nous allons le voir pour ce qui est du cas d’Aïn Témouchent. Les POS sont étudiés localement et approuvés par le wali après une phase de consultations impliquant en principe les citoyens. Ceci étant, les 28 communes que compte possèdent déjà un PDAU. Les impératifs de développement ont imposé la nécessité d’une révision des instruments d’urbanisme entre 2005 et 2008. C’est ainsi que neuf nouvelles études de PDAU englobant 21 communes, ont été initiées. Sept d’entre elles concernant 14 communes sont en phase de lancement, quatre autres touchant 9 communes achevées, trois en cours d’élaboration et enfin deux ayant fait l’objet d’un appel d’offres au profit de 6 communes grâce à une autorisation de programme du ministère de l’Habitat d’un montant de 15 millions de dinars, incluant les PDAU, les POS et les études d’aménagement. Des groupements de communes, comme Sidi Ben Adda, Aïn Témouchent, Chentouf, Châabat El Leham, ont bénéficié, en 2008, d’une révision de leur PDAU. Il faut rappeler que la plupart des communes du pays ont été pourvues, entre 1994 et 1998, de plans d’aménagement conçus normalement pour une période comprise entre 20 et 25 ans. La conjoncture économique marquée par une exceptionnelle embellie financière a bouleversé la donne au plan prévisionnel, puisque la mise en œuvre à partir de 1999 de deux plans quinquennaux devait influer fortement sur la configuration des PDAU. Les besoins immenses des populations, évalués sur la base d’indices nationaux de développement, se sont traduits sur le terrain par une fulgurante consommation foncière qui s’est faite, parfois, au détriment des espaces verts.
Dans son exposé, la directrice de l’Urbanisme n’a pas manqué de souligner le caractère aléatoire des plans d’occupation du sol (POS), compte tenu des changements intervenus dans les contenus des programmes de développement. La wilaya a engagé 102 études de POS sur les 124 programmées. Pour l’instant, 89 POS ont été approuvés, 09 sont au stade de l’étude et 02 encore à la phase publicitaire. En 2008, 05 POS ont reçu l’aval du wali tandis que 15 études d’aménagement faute de POS sont prêtes. Par ailleurs, 08 autres études géotechniques (EGT) couvrant une superficie de 122 hectares, sont inscrites. A ce jour, sur 05 EGT lancées, 03 sont bouclées et 02 en cours d’expertise. Le reste, de la tranche 2008, est en voie d’achèvement. Au chapitre de la réglementation, les services de l’Urbanisme ont délivré, durant l’année 2008, 1 174 permis de construire, 08 certificats d’urbanisme, 55 permis de démolir, 45 certificats de morcellement, 12 permis de lotir, 90 certificats de conformité, et ont recensé 76 infractions au code de l’urbanisme. Le volet de l’habitat précaire fait ressortir, pour l’ensemble des communes, 5 126 constructions vétustes situées au niveau de 182 sites abritant 6.191 familles. Les opérations de démolition ont touché 5.095 maisons et leurs occupants ont été relogés dans le cadre des programmes de Résorption de l’habitat précaire (RHP). L’amélioration du cadre de vie représente aussi une dimension sensible au regard des besoins enregistrés. La wilaya a lancé depuis 2005, 37 opérations de viabilisation pour un montant global de 423 milliards de centimes. Pour l’année 2008, l’autorisation de programme consacrée à l’aménagement urbain d’une valeur de 165 milliards de centimes, a permis la prise en charge de 168 sites et quartiers dans les 28 communes. Après trois années, 121 opérations ont été clôturées. Au titre de l’année 2008, 34 quartiers en cours d’aménagement ont profité de ce programme.A la lumière de ces données, il est temps de faire une halte et d’inviter les acteurs du développement local à réfléchir sur le sujet pour évaluer les acquis et déceler les ratés d’une urbanisation menée tambour battant à la suite de deux plans quinquennaux particulièrement généreux s’agissant de la wilaya d’Aïn Témouchent, zone sinistrée au lendemain du séisme de 1999. L’urbanisme de projets dans ses différentes composantes s’est avéré souvent déconnecté des documents de planification fréquemment mis à découvert. Réviser un PDAU ou un POS au gré des conjonctures et des opportunités foncières ne signifie nullement densifier à tout va. Le POS du centre-ville à Aïn Témouchent par exemple continue de souffrir à cause des imprévoyances cumulées depuis 1999. La réhabilitation et la requalification du bâti ancien ont montré leurs limites dès lors que les locataires, propriétaires et copropriétaires touchés par la démolition et pour la plupart relogés, se sont manifestés pour revendiquer leurs droits sur l’immobilier, vidant ainsi de sa substance le POS établi. Dans l’urgence, personne n’a pensé à mettre des garde-fous juridiques pour faciliter la récupération de manière légale des poches désertées. Une faille qui a transformé, en l’espace de cinq années, la vieille ville en un vaste bazar où la fonction commerciale a largement pris le dessus sur l’aspect résidentiel. La réhabilitation du bâti et son exploitation se sont opérées en dehors du cadre officiel et réglementaire. Aïn Témouchent, la coquette jadis, réputée pour son cachet original, est en train de perdre progressivement son charme et son identité.
Les POS, revus, corrigés et portés postérieurement à la connaissance du grand public, ont révélé d’autres surprises. Le «UMRAN», censé incarner la culture et un niveau civilisationnel selon Ibn Khaldoun, continue de subir les assauts du béton. Et la Banque mondiale savait à quoi s’en tenir lorsqu’elle a exigé, pour la construction de la nouvelle ville, l’implication d’un architecte paysagiste pour la réalisation de la partie «Espaces verts». D’ailleurs, l’aménagement d’un jardin central d’un hectare au sein de la nouvelle ville a été couronné par le prix «Good practice» au concours international de l’ONU, en 2006. Pourquoi les lotissements ceinturant la cité de Sidi Saïd ont-ils pratiquement tous perdu leurs espaces verts ? Durant la conférence de presse de Mlle la DUC, un confrère, également président d’une association de défense de l’environnement, a soulevé le problème rencontré par l’association «Ahia» de la cité Mohamed Boudiaf, laquelle conteste l’implantation d’une clinique privée sur une aire de repos prévue en tant que telle dans une étude de POS antérieur, semble-t-il, à celui révisé en dernier. Qui a ordonné la conversion de l’assiette en question, trop petite au demeurant pour le projet annoncé ? Quoiqu’il en soit, les modifications apportées au parcellaire du lotissement 320 logements n’ont-ils pas fait l’objet d’une correspondance du wali en date du 21 août 2001 portant n°2572, appelant à mettre fin à ces agissements ? Tant que l’espace est encore «vert», il reste protégé par la loi n°07-06 du 13 mai 2007, et si le POS ou le PDAU ne sont pas le «Coran», comme l’a indiqué la responsable du secteur dans son exposé, qu’est-ce qui empêche de rectifier le tir en maintenant la vocation initiale de l’assiette litigieuse. Dans ce cas précis, le wali reste le seul juge.

Source : Echo-Oran

3 réflexions sur « Les PDAU et le POS ont-ils une valeur prospective ? »

  1. :crt: je veux féliciter bien les Algériens pour cette festivité foot balistique
    et je remercie beaucoup les responsbles de ville Ain Temouchent pour sa bonne gertion .

  2. bonjour..salam..juste une chose…la critique est aisé mais l ‘art est difficile…c ‘est malheuresement le caractère de la plupart des algériens…bonne chance pour les gestionnaires de Ain Temoucchent…

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